Petits monochromes délictueux - PMD

Criminal/delicious little monochromes

On voit comment le travail du support introduit une temporalité dans le jaune monochrome, initialement uni

De l’œuvre à l’objet-laboratoire Lien vers cette section : De l’œuvre à l’objet-laboratoire

L’idée de travailler au sujet de la question de la détérioration, de la restauration et de la documentation relative à une œuvre, vient de la visite d’une exposition réalisée par le Musée du Louvre, intitulée "Polyptyques" (1990), qui confrontait des œuvres historiques et contemporaines.

La majorité des retables présentaient des craquelures, à la jonction des éléments qui constituaient le support, et diverses traces d’usure ou d’impact dues à l’usage.

La perception d’une profondeur temporelle résultait à la fois de la narration picturale, des références aux mythologies en même temps que de la visibilité de l’empreinte du temps réel, inscrite par les coups, les frottements et par le travail sous-jacent des matériaux.

A la profondeur symbolique du retable s’ajoutait ainsi la lecture formelle d’un objet détérioré qui affichait, en dépit des restaurations successives, un vieillissement inéluctable.

Des travaux contemporains offraient en contrepoint la possibilité d’une autre perception par des propositions qui gommaient la figure, la narration et se focalisaient sur des aspects formels (Ryman, Asse, Marden, Kelly, Soulages).

Il en résultait la sensation d’un aplat, d’une surface au besoin résultant d’une combinatoire, et d’une mise à distance critique.

En s’approchant œuvres d’art, chacun pouvait pourtant observer les empreintes de l’usage et le vieillissement des matériaux, des paramètres incontrôlables par les auteurs.

Les éléments de Kelly, tout particulièrement, qui comportaient des traces de manipulation, apparaissaient tels les révélateurs d’une histoire qui se déroulait hors champ.

Le regardeur se trouvait dès lors confronté à des injonctions de lecture paradoxales : si Kelly dit, d’un côté, "La forme de ma peinture est son contenu", la réalité de sa peinture telle qu’elle s’offrait au regardeur incorporait, de l’autre, les traces des activités menées hors cadre. Des activités professionnelles multiples (des traces de manipulation pour l’accrochage par exemple, mais également de la production textuelle...) qui assurent une présence publique et une existence institutionnelle ; une "profondeur historique" découlant d’une perspective critique comme le signalait par ailleurs Rosalind Krauss.

D’où une série de propositions développée sur le thème du monochrome, dont l’existence indexe pour une part les tentatives picturales désespérées menées pour contourner la narration et son corollaire, le vieillissement.

D’une manière générale, chacune d’elles s’accompagne d’un travail sur l’archivage : l’usager ou le collectionneur réalise une documentation à leur propos ; dans l’espace muséal l’objet collectionné est en réalité un objet-document :l’objet n’existe que parce qu’il est documenté.

À notre niveau, le projet d’intégrer intentionnellement une pratique documentaire associée à l’usage d’un objet artistique (accrochage, stockage, maintenance, vente...), engage un déplacement qui fait de l’oeuvre, une œuvre-document progressivement enrichie à partir d’un protocole que l’on peut appeler objet-laboratoire :

Petits monochromes délictueux, série initiée en 1990 diversement actualisée ensuite.
L’objet peint, son protocole et sa documentation, le tout forme un objet-document

Expositions initiales Lien vers cette section : Expositions initiales

Ce projet a été présenté une première fois à la galerie du CROUS à Mont-Saint-Aignan en 1994, voir cette page

Voir également la série interdit de restaurer :

3 pas + 1991.B / Interdit de restaurer, 1991, détail, présenté en diverses occasions
Série initiale

Actualisations Lien vers cette section : Actualisations

Sexy formalism and Rosalind – Red, 1993/2016. Exposition GRAP’s et invités, galerie d’art contemporain, Auvers-sur-Oise, 2017
Icônes, 2019

Informations Lien vers cette section : Informations

Titre : Petits monochromes délictueux

Série initiée en 1990
Bois, enduit, peinture

Dimensions 30 x 30, 40 x 40, 100 x 100.

Bibliographie : Karen O’ROURKE, L’archivage comme pratique artistique. Rapport pour le CNRS, programme "Archives de la création" (dir. C. Mieréanu), 2002.

Collections particulières et collection de l’artiste


Photographies : christophe le françois

Pour prolonger

  • Dispositif "Mémoires d'une exposition" - Documentation et archives

    Mémoires d’une exposition

    Memories of an exhibition (1993)

    Du 19 juillet au 14 août 1993 quelque chose était présenté... Qu’en reste-t-il ?

  • /2-G - Dispositif (1991-92)

    Abstract research

    Recherches réalisées autour du motif de l’écriture, à partir d’une matrice d’opérations plastiques préalablement définies : des principes récursifs à partir desquels se développent des formes fractales

  • Infest

    1991-92

    Protocole d’échange et de modification de documents dans un réseau numérique ; atelier des réseaux ; Cité sciences et de l’industrie. 1991

  • De l’œuvre à l’objet-document (1)

    L’influence américaine - 1997

    Un objet-document se substitue à l’objet d’art ; il témoigne d’une activité conduite à l’aide d’une notation plastique